Une nouvelle organisation et un financement rénové pour des CAUE fragilisés : des préconisations claires ont publiées

Par Agathe Gentili

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Un rapport publié le 23 février 2015 par le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et l'Inspection générale des Affaires culturelles vient donner quatre scénarios d'évolution pour les Conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE).

Les Conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) ont été instaurés à l’échelon départemental par la loi du 3 janvier 1977, avec pour objectif premier de promouvoir une architecture et un environnement de qualité. Les missions de cette association sont fondées sur le conseil, la sensibilisation et la formation dans les domaines de l’environnement, de l’aménagement, de la construction et de l’urbanisme. Les CAUE prodiguent leurs conseils gratuitement aux collectivités qui le demandent, ainsi qu’aux particuliers.

Un rapport de la mission d’expertise sur l’évolution des CAUE, publié en décembre 2003, confirmait que l’utilité des conseils et l’efficacité des CAUE n’étaient pas contestées. Toutefois, une réforme de leur financement les a conduits à une situation financière alarmante. Essentiellement assurée par une part de la taxe d’aménagement depuis une réforme fiscale de 2012, cette contribution ne leur permet pas d’anticiper leur budget d’une année sur l’autre. En effet, la réforme a induit une insécurité dans leurs recettes et même si celles-ci sont en hausse pour l’année 2014, l’année 2013 les a exposés à une baisse de près de 37 % de leur budget par rapport à l’année 2012. Cette insécurité avait d’ailleurs conduit la Cour des comptes, rapidement après la réforme, dans son rapport annuel de 2013, à soulever la nécessité de revoir le financement de ces groupements, si le choix de les maintenir était opéré.

Publié au Journal Officiel du 18 novembre 2014, une question n° 69013 de la députée Valérie Fourneyron ravive le débat autour de ces instances. Elle interpelle le secrétaire d’État sur la situation financière critique des CAUE qui menace leur efficacité et jusqu’à leur existence. Un rapport commun du Conseil général de l’environnement (CGEDD) et de l’Inspection générale des Affaires culturelles (Igac) publié le 23 février 2015 apporte une expertise bienvenue sur la question.

Ce nouveau rapport était nécessaire en raison du contexte renouvelé dans lequel évoluent les CAUE : l’intercommunalité, la création en 2011 d’une union régionale des CAUE qui fédère 11 structures régionales, l’émergence de la notion de développement durable, ainsi qu’une réforme visant à réorganiser le territoire de la République (loi NOTRe adoptée en première lecture au Sénat le 27 janvier 2015 et par l’Assemblée Nationale en première lecture le 10 mars 2015), rendent notamment les recommandations antérieures obsolètes.

Envisageant quatre scénarios pour les CAUE, leur suppression, leur mise sous tutelle de l’Etat, l’amélioration de leur situation actuelle et leur changement d’échelle, le rapport privilégie toutefois les deux derniers schémas identifiés en raison du rôle important des conseils prodigués par les CAUE et de la nécessité de demeurer dans la mouvance actuelle de décentralisation. Les auteurs prévoient et analysent les possibilités d’amélioration du dispositif en vigueur et évoquent une évolution vers un CAUE régional davantage mutualisé. Cette dernière proposition de régionalisation s’inscrit tout à fait dans le cadre des modifications de l’organisation du territoire qui tendent depuis une décennie à renforcer les régions aux dépens des autres collectivités. Néanmoins, il est important de mentionner que cette éventualité était écartée explicitement dans le rapport précité de 2003 qui, bien qu’admettant que l’échelle régionale semblait intéressant, pour une meilleure cohérence, dans le cas de l’existence de parcs naturels régionaux, insistait sur l’indispensable proximité des CAUE.

Tout en rejetant la suppression de ces instances décentralisées, le rapport soutient une réforme de fond, tant financière qu’institutionnelle. Il souligne des lacunes dans l’organisation des CAUE (p. 45) : leur cloisonnement et leur hétérogénéité induisent un manque d’esprit collectif, ainsi que l’absence d’évaluation de leur activité. Travaillant sur ces insuffisances, les auteurs identifient six axes de progrès (p. 51-53) : « sauvegarder les fondamentaux de la loi de 1977 » ; « sécuriser le financement » ; « mesurer les activités, évaluer leurs impacts » ; « organiser la comparabilité et la consolidation des données » ; « repenser l’échelle territoriale des activités, mutualiser » et « promouvoir et décliner sur les territoires la transition énergétique et écologique ». Ces pistes de travail ont inspiré les responsables politiques qui se sont prononcés récemment en faveur d’une nouvelle légitimité des CAUE. En effet, le projet de loi Liberté de création, architecture et patrimoine, qui devrait être étudié par les parlementaires au printemps 2015, prévoit de renforcer les CAUE en rendant leur consultation obligatoire pour tout maître d’ouvrage personne physique souhaitant réaliser des travaux soumis à autorisation de construire, sur un territoire proche d’un site classé ou comprenant une cité historique (art. 27).

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