Un décret offre aux services instructeurs un outil de plus dans la lutte contre les signatures illicites des permis de construire des projets architecturaux

Par Timothée Diot

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La profession d'architecte et son organisation ont fait l'objet de plusieurs débats lors de l'élaboration de la loi relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (loi CAP). Un récent décret apporte des précisions sur des mesures issues de cette loi et plus particulièrement sur la lutte contre les signatures frauduleuses dans les projets architecturaux.

Le décret n° 2017-495 du 6 avril 2017 portant diverses dispositions relatives à l'organisation de la profession d'architecte a été pris en application de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions et des articles 85 et 86 de la loi CAP.

Ce décret modifie de manière conséquente le décret du 28 décembre 1977 qui est le fondement de l'organisation de la profession d'architecte. Il précise les modalités d'application de trois mesures importantes : la modification du nombre de conseillers au sein des conseils régionaux de l'ordre des architectes (CROA), l'application des dispositions relatives à l'obligation de représentativité des territoires au sein des CROA et l'application de la nouvelle compétence des CROA dans la lutte contre les signatures frauduleuses par des architectes, qu'elles soient de complaisance ou illicites.

Le décret n° 2017-495 du 6 avril 2017 introduit de nouvelles dispositions qui renforcent le rôle des CROA dans cette lutte.

La première des dispositions vise à donner aux CROA une connaissance exhaustive des dossiers déposés par les architectes régulièrement inscrits à l'ordre des Architectes. En effet, le décret n° 2017-495 stipule que les architectes inscrits à l'ordre devront déclarer les permis de construire et d'aménager dont ils assurent la conception architecturale auprès du CROA dont ils dépendent. Cette déclaration se fera par courrier ou par voie électronique concomitamment au dépôt des dossiers de demande d'autorisations d'urbanisme. Un récépissé sera délivré à l'architecte selon une procédure que le Conseil national de l'ordre des architectes (CNOA) doit encore définir.

La seconde disposition a pour objectif de rendre systématique le partage d'informations concernant l'existence de signatures frauduleuses. Les services chargés de l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme peuvent saisir un CROA pour vérification lorsqu'ils soupçonnent que l'architecte qui a signé un permis de construire ou d'aménager n'est pas inscrit à l'ordre des architectes ou n'a pas participé à l'élaboration du projet. Le décret n° 2017-495 précise que lorsqu'un CROA confirme les soupçons des services instructeurs, il les en informe sans délai, ainsi que le CNOA.

Les autorisations dont le projet architectural est signé par un architecte qui ne serait pas inscrit régulièrement à l'ordre des architectes ou par un architecte n'ayant pas participé à son élaboration sont entachées d'illégalité. La délivrance de telles autorisations est en infraction avec l'article 3 de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture repris par le Code de l'urbanisme aux articles L. 431-1 et L. 431-2.

Ces mesures seront pleinement effectives après l'approbation par le ministère de la Culture du nouveau règlement intérieur de l'Ordre qui précisera les modalités pratiques de transmission des signatures et la méthode pour établir les récépissés.

Les mesures apportées par la Loi CAP renforcent donc la dynamique de lutte contre les signatures frauduleuses. Toutefois, pour obtenir des résultats sensibles, le CNOA et les CROA devront sensibiliser les maîtres d’ouvrage et les administrations à ces problématiques. C'est en effet à ces deux familles d'acteurs que revient la responsabilité de saisir les CROA en cas de suspicion de fraude.

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